C’est à cette période que se déroule l’histoire racontée par le film de Denys de la Patellière Un taxi pour Pyrgos (avec Lino Ventura, Charles Aznavour, Djamel Saïd, Amadou M’ba et Hardy Krüger), qui restitue bien l’ambiance de l’époque et la mosaïque de combattants composant les forces françaises engagées dans le Péloponnèse.
Et dire que certains avaient cru qu’en juin 1940 la France se serait rendue. C’était une idée absurde. La France n’avait perdu qu’une seule bataille. Elle était bien décidée à gagner la guerre.
Le Grand Déménagement s’étant déroulé de juin à août 1940 a permis l’évacuation en Afrique du Nord de centaines de milliers de militaires, d’ouvriers et de scientifiques français.
L’Empire français contre-attaque aux côtés des Britanniques. À Alger Paul Reynaud, le général de Gaulle, Léon Blum & Georges Mandel poursuivent la lutte, tandis qu’à Paris Laval, Doriot, Déat & Darnand se lancent dans la collaboration.
Cette uchronie relate le conflit militaire (l’attaque de Mers el-Kébir a bien lieu, mais elle est le fait des Italiens), mais aussi la guerre économique (la production minière dans les colonies et les territoires d’Outre-mer n’était pas négligeable ) et la lutte culturelle (Pierre Brossolette et Pierre Dac sont dans le camp des alliés… est-il besoin de préciser dans quel camp se retrouve Céline ?).
Cet ouvrage ne se présente pas seulement comme un récit des évènements, mais fait intervenir des citations d’ouvrages fictifs ou plutôt différents de ceux de notre réalité. Ainsi les Mémoires de guerre du général de Gaulle ont pour tome 1 Le Sursaut ( dans notre réalité L’Appel). De même l’ouvrage de l’officier d’état-major Marc Bloch a pour titre L’étrange victoire (L’étrange défaite dans notre monde). Et tandis que Marcel Jullian écrira Jean Maridor chasseur de France au lieu de Jean Maridor chasseur de V1, Alistair Mac Lean consacrera un roman Les Canons de Limnos au lieu des Canons de Navarone inspiré d’un raid de commando en Méditerranée. D’autre part l’un des chapitres de Feux du ciel de Pierre Closterman a été nommé Les Anges de Saïgon et relate la défense aérienne de l’Indochine confrontée à l’assaut des forces coalisées japonaises et thaïlandaises.
C’est également en Asie que se déroule un texte littéraire écrit par une certaine Marguerite Donnadieu (connue par la suite sous le nom de Marguerite Duras).
On trouve également un extrait de Casabianca le livre du commandant Jean l’Herminier (qui relate la guerre sous-marine en mer de Chine), le Journal de guerre de Frédéric Joliot Curie (la participation des Américains sur le projet franco-britannique « Concorde » a fait rebaptiser ce dernier « Projet Manhattan »), le rapport officiel britannique évoquant le combat avec le raider KMS Kormoran, les argumentations du général Joukov s’adressant à Staline et le rapport d’un général de la police allemande confronté à cette curieuse population appelée « Ch’tis » !
Comme les forces de Mussolini ont été rapidement chassées d’Afrique le général Rommel ne portera jamais le surnom de « Renard du désert ». Mais du fait de son champ de bataille il mérite bientôt le titre de « Renard des Balkans ». Cette zone de combat se révèle à la fois complexe et mortelle. Tandis que les Croates n’ont guère envie de mourir pour Belgrade, la querelle se ravive entre Grecs royalistes et Grecs républicains. L’un des Hellènes suggère d’ailleurs à son contradicteur d’aller se faire voir chez… les Anglais !
Sur mer la sortie offensive du Bismarck et du Prinz Eugen ne se déroule pas comme indiqué dans les livres d’Histoire. Si le cuirassé Hood qui s’interpose est très vite coulé, le Prince of Wales ne se replie pas. En fait, il est resté au port. C’est au cuirassé Richelieu et au croiseur lourd Algérie de riposter.
En Asie les opérations militaires suivent également une voie divergente. Le général Mac Arthur reste sur place…et ne reviendra pas. De leur côté les Français mettent en action le plan d’urgence Épervier ( !) qui consiste à construire une base aérienne secrète ( nommée Dien Bien Phu) d’où Français, Chinois et Tigres Volants font décoller des raids surprises.
En France occupée, la rafle du Vél d’hiv doit être considérée comme un échec. Les collaborateurs sont perplexes. L’essentiel des policiers français obéiraient-ils toujours à leur ministre Mandel qui se trouve à Alger ?
Cependant la répression est féroce. Le massacre de Tulle se produit le 25 décembre 1941 (au lieu du 9 juin 44). Du fait du retard causé par les nombreuses opérations en Méditerranée, l’opération Barbarossa contre l’URSS se produit le 17 mai 42 ( au lieu du 22 juin 41).
Cependant on observe certaines constantes. À Pearl Harbor, le jour d’infamie a bien lieu le 7 décembre 1941. Plus curieux l’opération Countenance (l’invasion de l’Iran) se produit à la même date et dans les mêmes circonstances. Elle implique donc une attaque de l’Iran de la part de l’Armée rouge alliée aux Anglais. Or du fait du retard pris par le déclenchement de Barbarossa, le pacte entre l’Allemagne nazie et l’Union soviétique est toujours d’actualité. Dans notre réalité c’est surtout pour assurer la route de ravitaillement sud vers l’URSS qu’elle a été déclenchée. Mais dans cette uchronie cette voie stratégique n’est pas encore d’actualité puisqu’en août 41 l’URSS est encore en paix.
Dans l’ensemble cette uchronie se révèle à la fois argumentée et pittoresque, procurant une Histoire divergente. Cette histoire alternée est d’autant plus crédible qu’elle aurait très bien se passer, la poursuite de la lutte en 1940 étant plus rationnelle que l’acceptation de la défaite.
Fiche Technique
Format : broché
Pages : 720
Auteurs : Jacques Sapir, Frank Stora, Loïc Mahé, Laurent Arenales del Campo, Alexandre Bertrand, Jean-Marc Mendel, Jean-Philippe Such, Alain Venturini & Patrick Voisin
Editeur : Tallandier
Sortie : mai 2012
Prix : 26,90 €