Interview de Frank Tallis

Onirik : Pourquoi le citoyen britannique que vous êtes a t-il choisi Vienne comme lieu d’action de ses romans ?

Frank Tallis [[docteur en psychologie, spécialiste des troubles obsessionnels et auteur des Carnets de Max Liebermann]] : Pour le décor. Je suis passionné par la ville. De plus je souhaitais donner à mes romans policiers un éclairage freudien et un traitement du cas criminel avec une analyse très précise, psychanalytique.

Onirik : Vienne est également la ville de Sigmund Freud.

Frank Tallis : Freud a réalisé avant beaucoup de monde l’importance que la psychologie pouvait avoir dans le cas criminel. Freud lui même disait que ses méthodes d’analyse pouvaient être appliquées aux investigations policières sur des cas de crimes. Il a d’ailleurs rédigé une introduction où il a rappelé le cas d’un criminel qui s’est dévoilé en faisant un lapsus.

Max Lieberman va essayer d’appliquer les méthodes de Freud en faisant en sorte que le criminel se livre lui même de façon involontaire, en commettant une erreur.

Onirik : Dans Les Mensonges de l’esprit qui relate une enquête au sujet d’une mort suspecte ayant eu lieu dans une école militaire, on découvre des enfants très durs, cruels, était-ce la volonté de mettre en scène une autre image de l’enfance?

Frank Tallis : Il s’agit d’une motivation freudienne. Avant lui on avait tendance à voir l’enfance de façon très naïve et les travaux de Freud ont montré que, dans sa colère, l’enfant peut être d’une rage et d’une grande violence. Il me semblait intéressant de jouer sur ce tableau de l’enfance beaucoup plus violent qu’on ne le croit.

Onirik : Les apparitions de Freud dans vos romans nous révèlent un personnage dynamique et relativement sérieux.

Frank Tallis : Freud est très sérieux sur ses photos où il correspond à l’image qu’on se fait d’un universitaire sérieux. En fait il détestait être pris en photo et le temps de pose engendre une attitude figée

Mais en vérité son tempérament était assez joyeux. Le personnage de Freud correspond à celui qu’il était dans la vie. Il a publié un livre qui parle de la psychologie de l’humour en général, ainsi qu’un recueil d’histoires juives.

Onirik : Le héros est psychiatre, mais aussi pianiste. Le rôle de Vienne en tant que capitale culturelle a t-il joué dans ce choix?

Frank Tallis : Il s’agit de la Vienne des débuts du XXe siècle. Cette ville marque une vraie rupture par rapport au XIXe siècle. Elle va initialiser tout ce qui se fera au XXe siècle, dans le domaine de l’art ou de la philosophie, etc. Elle constitue le théâtre des enquêtes de Max Lieberman, comme témoin des changements des mentalités et des idées au début du XXe.

Ce qu’il y a d’intéressant dans la vie artistique de Vienne au début du XX siècle, c’est qu’elle est fortement marquée par le thème de l’amour et de la mort. Eros & Thanatos sont des thèmes largement abordés par Freud et je voulais que ces thèmes aient de l’importance dans les romans et qu’elle soit sensible. Précisons que le roman policier concerne souvent l’amour et la mort.

Onirik : En fait la série Les Carnets de Max Lieberman concerne deux héros : le psychiatre Max Liberman et le policier Oskar Rheinhardt

Frank Tallis : Pour l’écrivain, le duo d’enquêteur lui permet de décrire l’enquête sous un éclairage différent. Généralement le duo est composé de deux personnes relativement différentes ce qui permet d’additionner des qualités et des compétences. Le duo Sherlock Holmes et le docteur Watson fonctionne très bien.