Le pavillon d’hiver – Avis +

Présentation de l’éditeur

Désemparée et démunie après l’incendie de sa maison, Jenny Majesky accepte la proposition de sa grand-mère : s’installer au pavillon d’hiver de Willow Lake, la propriété familiale où, adolescente, elle passait ses étés… Loin de tout, dans ce décor sauvage empreint de nostalgie, la neige et le silence font resurgir en elle un flot de souvenirs : le premier – et l’unique – baiser de Rourke, le garçon qu’elle aimait alors, et, plus tard, la douleur muette dans ses yeux quand Joey, son meilleur ami, l’avait demandé en mariage…Elle avait tant espéré, pourtant, que Rourke se déclare ou lui fasse un signe… avant d’épouser Joey.

Depuis, les années ont passé. Les non-dits et la mort tragique de Joey ont achevé de les séparer ; Rourke multiplie les conquêtes éphémères et, bien que la côtoyant tous les jours, dans la petite ville d’Avalon, semble tout faire pour l’éviter…Aussi, quelle n’est pas sa surprise, peu après son installation, de le voir se présenter à la porte du pavillon. Que vient-il faire ici ? Serait-il encore temps de tout recommencer avec cet homme qu’elle a attendu toute sa vie…

Avis de Marnie

Ne faites pas comme moi… Ne lisez pas dans la collection Best-Sellers le quatrième tome puis dans la collection Jade, le deuxième volume d’une même série (celle du lac des Saules), certaines surprises seront malheureusement dévoilées bien trop tôt ! Il aurait été peut-être plus judicieux de ne pas les faire ainsi se chevaucher dans les parutions. Hormis ce désagrément, ce pavillon d’hiver constitue une très belle réussite qui nous renforce dans notre opinion sur l’évolution de Susan Wiggs, un des meilleurs auteurs de chroniques, l’égale de Sheryl Wood, en tout cas meilleure que ce que nous présente actuellement un auteur confirmé comme Debbie Macomber.

Loin de se plonger dans le passé avec nostalgie, Jenny se voit dans l’obligation de faire face aux revers subis depuis plusieurs années. Mais voici que sa grand-mère qui l’a élevée vient de décéder et que quelques semaines plus tard, leur maison est détruite par un incendie. Notre héroïne y voit alors la rupture du seul lien qui la rattachait à ce village auquel, elle s’est retrouvée enchaînée par les liens de l’amour filial depuis de longues années… Il est peut-être temps pour elle de réaliser ses rêves d’adolescente. Seulement, cela n’est pas l’opinion du chef de la police, Rourke, son ami d’enfance.

C’est une très jolie et sensible histoire qui se déroule ainsi… d’une simplicité évidente, qui retient notre attention de bout en bout avec très peu de péripéties, juste ce qu’il faut de suspense savamment dosé pour distiller émotions, non-dits et ressenti. Susan Wiggs possède le talent de nous décrire tout le passé des différents protagonistes de l’histoire, en évitant le lourd flash-back chronologique, préférant des petites scènes fortes, déterminantes, au gré des incidents qui surviennent dans le présent. Ainsi, nous plongeons par exemple en 1988, puis dans le présent, et encore en 1977, le tout rythmé par d’authentiques (j’en connais certaines…) recettes de pâtisseries polonaises adaptées à tous les moments de l’existence.

Il faut vraiment saluer cette construction très intelligente, qui équilibre le récit tout en donnant du relief à l’histoire et qui est pour beaucoup dans l’atmosphère, la compréhension des personnages, et l’appréhension des évènements. L’introspection forcée revécue par Jenny se situe au centre du récit… ses choix dont la portée de certains pèsera lourdement sur ses épaules, sont finalement assumés, comme d’autres seront remis en question, la maturité et la connaissance de soi de l’héroïne permettant enfin de se libérer d’une culpabilité plus ou moins avouée. Face à ce beau portrait de femme mais aussi d’enfant d’émigrés (ici, cette précision est loin de constituer un détail) se confronte celui d’un américain, issu lui d’une riche famille de politiciens, qui pourtant a rejeté les honneurs et toute la fortune familiale. Enfant mal aimé et battu, il a trouvé sa voie… mais lui aussi est dévoré par les conséquences de ses erreurs…

La petite ville d’Avalon, idyllique, représente dans cette série le cadre des amours de nos héros. Pourtant, tout comme Sheryl Woods, Susan Wiggs nous décrit une petite cité ou certaines zones d’ombre subsistent. Malversations, disparition mystérieuse, adolescentes enceintes… une charmante petite bourgade américaine où il ne se passe rien. Malicieusement, l’auteur a appelé un magasin « Zuzu’s petals ». Certains cinéphiles reconnaîtront les célèbres exclamations hystériques de James Stewart dans La vie est belle – It’s a wonderful life de Frank Capra, lorsqu’il s’aperçoit qu’il est enfin revenu chez lui, en tâtant dans sa poche les pétales d’une fleur données par sa fille Zuzu ! Une toute petite ville comme Avalon, qu’il rêvait pourtant de quitter…

Un livre charmant… qui contribue à nous faire croire avec talent au rêve américain avec dans l’idée que l’histoire se répète, les traditions se perpétuent mais que le temps avance inexorablement…

Avis de Domino

Le pavillon d’hiver est la suite du cycle Lakeshore Chronicles initié avec Un été à Willow Lake.

Dans ce nouveau roman, l’action se déplace du camp de Kioga à la petite ville d’Avalon et l’intérêt se focalise sur Jenny, la boulangère, qui a vu toute son existence bouleversée durant l’été. A cette époque, elle a fait connaissance de son père et s’est découvert une demi-sœur. Mais le mystère est resté entier au sujet de sa mère qui reste introuvable.

Quand l’action démarre, Jenny a du mal à refaire surface après la mort de sa grand-mère qui l’a élevée et voit tout son passé disparaître en fumée quand sa maison est détruite par un incendie. Cependant, ce drame la remet en présence du seul homme qu’elle n’ait jamais aimé et qu’elle fuit depuis des années, Rourke, le shérif de la petite ville. Ils s’évitent depuis la mort du fiancé de Jenny des années plus tôt, rongés chacun par un profond sentiment de culpabilité. Obligés de se côtoyer, l’amour va flamber de nouveau entre eux leur laissant la possibilité d’y succomber ou de refuser le bonheur qui passe à portée de leur main. Dans ce roman on retrouve aussi Olivia Bellamy qui prépare son mariage et sa cousine la jeune Daisy qui doit affronter les conséquences de sa légèreté.

Jenny et Rourke sont deux êtres profondément torturés, rongés par leur passé et incapables de le dépasser. Outre celui-ci, les blessures de l’enfance ont laissé des traces indélébiles qui ne font qu’accentuer leur souffrance. Il leur faudra faire la paix avec eux-mêmes, affronter la mort pour enfin accepter leurs sentiments.

Ce roman comme le précédent est bâti sur des allers et retours entre passé et présent. Le présent est de nouveau éclairé par des épisodes du passé de chacun des protagonistes, non seulement des principaux mais aussi des secondaires comme la mère de Jenny. Le passé et le présent se répondent en échos parfois troublants tissant des liens entre les personnages et les époques. Le récit est donc éclaté entre les divers personnages mais également entre les différentes époques. Le roman ressemble ainsi à un vaste puzzle et dont on se passionne à assembler les pièces.

Outre cette construction morcelée, une des originalités du roman est d’offrir en tête de chaque chapitre, une «vignette», texte écrit par Jenny extrait de son livre «De la nourriture pour l’âme» et qui précède une recette de pain ou de gâteau.

Comme dans la plupart des romans de Susan Wiggs, c’est l’émotion et l’analyse psychologique qui dominent. L’auteur excelle dans la description des tourments intérieurs des uns et des autres mais sans jamais tomber dans la sensiblerie. A cet égard, la retenue dont elle fait preuve dans le récit de l’enfance de Rourke est symptomatique. En quelques touches et quelques mots, on apprendra qu’elle fut un calvaire sans que pour autant l’auteur s’y attarde, alors qu’elle est une des clés pour comprendre Rourke !

L’autre grande réussite du roman est le soin apporté aux autres personnages, que ce soient la « nouvelle » famille de Jenny, ses amies ou les ados qui peuplent le récit. Décidément, l’auteur est particulièrement à son aise dès lors qu’il s’agit de brosser le portrait d’une petite ville et de ses habitants. Il lui suffit de quelques phrases pour l’animer et pour donner l’envie d’en savoir toujours plus.

Lorsqu’on referme le livre, on quitte à regret Avalon car on est resté sur sa faim sur le devenir de relations prometteuses tout juste ébauchées. Heureusement, la suite de la série est prévue pour l’automne, alors, rendez-vous en septembre !

Fiche Technique

Format : poche
Pages : 467
Editeur : Harlequin
Collection : Best-sellers
30 novembre 2007
Prix : 6,70 €