Le voyage d’hiver – Avis +


– C’est la première fois que je m’apprête à faire exploser un avion. C’est aussi la dernière fois puisque je serais à bord.

Le terroriste prénommé Zoile (voyez les conséquences lorsque les parents veulent faire preuve d’originalité !) a décidé de détourner un avion afin qu’il s’écrase sur la Tour Eiffel. Sa démarche de terroriste aérien est parfaitement rationnelle (« le terroriste aspire au ciel, terroriste terrestre cela a un coté marin d’eau douce » ). Cependant il ne se considère pas comme un terroriste car il n’a pas de revendication. En fait il s’agit d’un acte d’amour. Il est tombé amoureux (« tombé amoureux l’hiver n’est pas une bonne idée« ) d’une dénommée Astrolabe (il s’agit d’un prénom masculin, mais sa mère voulait certainement faire une allusion à la castration puisque ce nom fut donné au fils d’Héloïse et d’Abelard, juste avant que ce dernier ne doive renoncer définitivement à avoir un autre enfant). Mais pourquoi la Tour Eiffel ? Tout simplement parce que si ce monument a la forme d’un A, c’est en raison de l’amour de Gustave Eiffel pour une femme prénommée… Amélie.

L’amour de Zoile pour Astrolabe n’ayant plus se concrétiser malgré l’emploi de champignons hallucinogènes, il accomplira son acte destiné à avoir un grand retentissement « Supprimez les médias et tous les terroristes se retrouveront au chômage. C’est pas demain la veille« .

Le narrateur étant le futur pirate de l’air amoureux terroriste, sa préparation relatée par écrit nous informe de son état d’esprit et d’un style enjoué (aux dernières nouvelles, le verbe « lamartiniser » n’existe pas), mais il ne vaut mieux pas contrarier ceux capables de s’attaquer à la Tour Eiffel par amour.

Difficile de ne pas y voir une allusion avec l’acte d’Erostrate qui obtint la renommée en incendiant le temple d’Artémis à Ephèse. Diane n’a pu protéger son temple étant occupé à veiller sur la naissance d’Alexandre le Grand. Mais Zoile étant le nom d’un sophiste s’étant fait lapider lorsqu’il s’essaya à la critique littéraire, pourquoi ne pas y voir une certaine animosité envers les critiques littéraires?

Entre allusions et éléments autobiographiques le dix-huitième titre d’Amélie Nothomb confirme son statut d’écrivain non-conformiste capable de traiter de la médiocrité d’un être qui étant tombé amoureux va sublimer sa passion en un acte autodestructeur.

Fiche Technique

Format : broché
Pages : 130
Editeur : Albin Michel
Collection : Littérature générale
Sortie : 19 août 2009
Prix : 15 €