Les ebooks sont-ils des livres

L’affaire signalée par Calimaq met enfin le doigt sur une question fondamentale pour les lecteurs. La proposition du député Kert visait bien entendu Amazon qui, en vertu de ses moyens, a les moyens financiers de payer les frais de port des livres qu’il vend et de se placer automatiquement un cran au-dessus de la concurrence puisqu’en France, le prix des livres est réglementé.

Mais dans le même temps, le même Amazon déploie la liseuse numérique Kindle et les services afférants. Isabelle Attard rappelle que ces services sont verrouillés par des DRM et qu’en conséquence, payer un ebook dans un service de ce type n’équivaut pas à acheter un livre.

On ne fait que payer un droit d’usage, sans avoir le choix du matériel, sans pouvoir donner et revendre les ebooks. Des systèmes de prêts existent bien sur certaines plateformes mais là encore, le client est inféodé aux conditions choisies par son fournisseur. A noter que c’est également le cas en dehors du terrain des ebooks, la vidéo à la demande est à ce titre un cas exemplaire.

En conséquence, le lecteur n’est plus propriétaire de sa copie. Qu’il prenne la liberté de ne pas respecter les conditions d’utilisation ou pour toute autre raison, le fournisseur peut supprimer ses ebooks du jour au lendemain.

Amazon peut le faire et en fait, il l’a déjà fait[[(1) : en 2009 http://www.numerama.com/magazine/13484-kindle-amazon-efface-a-distance-des-centaines-de-livres-achetes-legalement-maj.html http://www.lemonde.fr/technologies/article/2009/07/22/amazon-jette-1984-dans-le-trou-de-memoire_1221324_651865.html ; en 2012 : http://www.numerama.com/magazine/24076-amazon-elle-perd-tous-ses-livres-kindle-achetes-sans-explication.html ; Voir aussi http://www.numerama.com/magazine/26762-avec-google-play-les-livres-achetes-ne-passent-pas-la-frontiere.html]].

Face à la copie numérique des œuvres, les ayants droits font bien souvent entendre leur mécontentement à l’encontre de ce qu’il considère comme un vol. Ce débat rappelle que les choses ne sont pas si simples qu’ils voudraient bien le dire et que certains acteurs n’hésitent pas à déposséder en retour leurs clients de ce qui leur était acquis avec le livre par exemple ou à faire exploser les tarifs avec la vidéo à la demande.

La proposition d’Isabelle Attard en ce qui concerne les ebook a donc le mérite de poser le problème et un commencement de solution. Considérant qu’ils dépossèdent le lecteur de la propriété de sa copie d’une œuvre, ils ne sont plus des livres mais des services. Elle propose donc de leurs appliquer une TVA standard de 19,6% à la place des 5,5% dont bénéficient les livres.

La proposition est intéressante mais elle ne dispense pas de se demander s’il est raisonnable de choisir un service qui nous dépouille de nos droits et de nos libertés.