LoveStar – Avis +

Présentation de l’éditeur

LoveStar, industriel génial et visionnaire, a bâti sa fortune sur un système de communication inspiré des oiseaux migrateurs, libérant pour toujours l’humanité du carcan de l’électronique. Et ce n’était que le premier jalon de son empire.

Entre autres inventions révolutionnaires, REGRET vous permet de rembobiner vos enfants, inLove calcule votre âme soeur sans erreur possible, et avec LoveMort vous pouvez offrir à vos concitoyens le spectacle grandiose de votre corps changé en étoile filante.

Indridi et Sigidur filaient le parfait amour, jusqu’au jour où Sigidur reçoit sa lettre d’inLove : ça y est, le système a trouvé son seul et unique… mais ce n’est pas Indridi !

Avis d’Emilie

Quel curieux et magnifique roman ! La quatrième de couverture nous l’annonce à cheval entre L’écume des jours et 1984, mais on peut y ajouter Le meilleur des monde pour faire bonne mesure.

Dans un futur indistinct, un mégalomane rêveur, LoveStar, monte sa société, qui porte le même nom, pour étudier la façon dont les oiseaux et insectes peuvent migrer sur d’immenses distances. Son bureau d’étude farfelu parviendra à offrir aux humains cette communication en temps réel, sorte d’intelligence collective troublante. C’est ainsi que les écrans et les câbles, rebaptisés chaînes, disparaissent de notre planète. Désormais, on communique sans appareil, on joue aux jeux vidéos via une lentille intégrée à l’oeil, et plus personne ne parait fou s’il parle seul dans la rue.

La société LoveStar ne s’arrête pas là. Sa succursale LoveMort met également en place une nouvelle technique pour mourir : on se fait transformer en étoile filante. Ce sont les économies de toute une vie qui permettent de finir en beauté. Son autre succursale Regret permet de faire calculer à un ordinateur si l’on a fait les bons choix. Une autre succursale encore permet de rembobiner ses enfants si l’on n’est pas satisfait d’eux. Indridi, notre héros, est d’ailleurs la deuxième version de lui-même. Indridi est aux quatre-cents coups : sa fiancée, avec laquelle il vit un amour fusionnel, vient de recevoir une lettre d’InLove, qui calcule à la perfection qui est votre âme sœur. Et selon la lettre, ce n’est pas lui.

Curieux monde que celui de LoveStar, mégalomane tout puissant qui plie le monde à sa vision des choses. L’écriture nous le rend éminemment sympathique alors même qu’avec un peu de recul, il est parfaitement haïssable. C’est d’ailleurs un paradoxe qu’on retrouve dans tout le livre : le monde léché, lisse, prévisible dans lequel nos héros vivent n’est pas enviable. Mais l’écriture poétique, farfelue, douce et belle nous le rend si attirant… On prend l’exemple de la publicité, qui est désormais envoyée directement au cerveau grâce aux « ondes des oiseaux ». C’est horrible, impossible de s’y soustraire. Mais on nous le présente d’une telle manière que ça semble absolument positif.

L’arc narratif est également corrompu. Chaque fois que le héros, Indridi, utilise un service de LoveStar, on a droit à une nouvelle description de ce service, comme si on nous en faisait la publicité justement. Pourtant, ce côté anecdotique est jouissif : où s’arrêtera la folie des hommes ? Chaque service est plus fou que le précédent et on a hâte d’en savoir toujours plus. Décrit sur un ton étrangement détaché, presque avec sarcasme, on apprend donc comment les humains vivent dans ce futur. Malgré tout, l’histoire d’amour, fil rouge du roman, avance sans qu’on s’en aperçoive. Le lecteur se laisse porter avec émerveillement dans ce monde désenchanté et pourtant si poétique.

S’il fallait n’en lire qu’un, ce serait celui-ci. Incroyable roman, surprenant, unique, qui terrasse son lecteur par sa fantaisie d’exception. Les lecteurs qui connaissent l’Islande, où se déroule l’intrigue, savent qu’il n’y avait qu’un Islandais pour écrire un tel OLNI (Objet Littéraire Non Identifié).

Avis de Olivier

L’étude des oiseaux migrateurs a conduit les ingénieurs islandais de LoveStar à une découverte révolutionnaire. Ils développent alors des implants de cerveaux qui permettent à chacun de communiquer à distance. En très peu de temps, tout le monde se laisse séduire… donnant ainsi un développement fulgurant de cette petite start-up.

Chacun peut maintenant recevoir télévision, mails, journaux du monde entier directement sur sa lentille optique, avec les indications GPS, publicités et recettes de cuisine. Cette invention va connaître toute une série d’évolutions spectaculaires, surprenantes et dévastatrices.

Le nouveau Big Brother n’est pas au service d’un état totalitaire, mais d’une puissante machine commerciale. Il peut utiliser les yeux et les oreilles de chacun pour analyser en finesse ses publics cibles. Les données des banques, des entreprises, des écoles, des centres commerciaux convergent vers un seul et même service ou aboutissent aussi toutes la correspondances privées.

Les avis des citoyens sont exploitables en temps réel par les puissants ordinateurs parlementaires, ce qui évite aux gouvernements de perdre du temps inutilement à prendre des décisions. Évidemment, des belles histoires d’amour couronnent l’ensemble, mélangées à une description assez réelle des workalcoholics.

Un roman d’anticipation, dans la lignée de 1984 et Globalia, avec de l’humour à la Boris Vian en prime. Ecrit, il y a 15 ans (édition originale 2002), ce livre fait preuve d’un esprit visionnaire remarquable concernant le développement des smartphones, du développement de Google et des big datas en tout genre.

Une réflexion interpellante sur la place de la technologie dans notre vie et en filigrane sur la manière dont une idée se développe ou pas. Seul bémol, quelques scènes un peu gore, dans la droite ligne des polars du nord, ternissent un peu l’ensemble.

Fiche Technique

Format : poche
Pages : 382
Editeur : J’ai lu
Collection : Imaginaire
Sortie : 6 mai 2017
Prix : 8 €