Mad Men – Avis +

1960, New-York, Nixon est en campagne contre Kennedy pour les présidentielles.

C’est au 23e étage d’une tour sur Madison que l’on trouve les bureaux de Sterling & Cooper, une agence de publicité de petite taille mais adressant des comptes high profile comme Lucky Strike et Kodak. C’est dans ces bureaux que se déroulera l’essentiel de l’action.

Le séduisant Donald Draper (interprété par Jon Hamm) dirige le département création et sa réputation est l’une des meilleures sur le marché. Il suscite la convoitise des autres agences et jalousie de ses employés. S’il est le personnage central de cette histoire, il est difficile de parler de héros. Draper est un homme sombre et ambigu, poursuivi par son passé. Bien que généralement avare de mots, son sens de la formule et sa force de persuasion face aux clients font l’admiration des employés et probablement celle du téléspectateur. Cet enthousiasme se nuancera rapidement quand on découvrira les faces obscures du personnage, ses relations extraconjugales et l’hypocrisie affichée avec sa femme, son machiavélisme et les secrets de son passé. Il apparaît souvent cynique et distant, voire même détaché du monde qui l’entoure. Il déclare vivre chaque jour comme le dernier.

– Hippy : You hucksters and your tower created religion of mass consumption.
– Draper : People want to be told what to do so badly, that they’ll listen to anyone.

Elisabeth Moss est Peggy Olson, fraîchement engagée comme secrétaire de Draper. Elle apporte d’abord un regard candide sur ce monde de « fous » puis qui découvre et comprend les codes qui le régissent. On suivra avec un intérêt grandissant au cours des épisodes son émancipation et sa progression personnelle et professionnelle.

Une dizaine d’autres personnages viennent compléter ce tableau :

– Le jeune cadre commercial (account manager) à l’ambition dévorante,
– le directeur artistique homosexuel refoulé,
– les créatifs (copy-writers),
– les vendeurs d’espace publicitaires,
– les secrétaires espérant plus ou moins secrètement trouver un mari dans cette jungle (ou s’ils sont déjà mariés, devenir leur maîtresse),
– les femmes aux foyers de ces madmen, noyant leur ennui dans les commérages et l’alcool
– et enfin les deux patrons : Sterling, la grosse cinquantaine, à la poursuite de sa jeunesse et Cooper, le vieux sage excentrique possédant un regard très affûté sur le monde de la communication.

Cette série est un des grands succès télé de 2007. Mais qu’est-ce qui la différencie des autres productions ?

D’abord, je pense que c’est la précision de l’environnement : les décors, les accessoires et le mobilier, les voitures et la mode vestimentaire. Une attention particulière a été portée sur le réalisme pour mieux nous plonger dans ces années 60 (à voir sur le site officiel).

Mais finalement, plus même que la description de l’univers de la pub (très proche que ce qu’il est aujourd’hui) et que les intrigues amoureuses de bureau, Mad Men est le prétexte pour Matthew Weiner de présenter une Amérique sexiste et raciste.

La femme américaine est « au foyer » si elle a trouvé le bon mari sinon elle sera secrétaire. Trois personnages viennent représenter un désir d’émancipation : Peggy la secrétaire au talent de rédacteur, et deux des maîtresses de Don : Rachel, directrice d’un grand magasin sur la 5ème et Midge, illustratrice dans la mouvance hippy.

Les personnages noirs occupent tous des emplois subalternes (homme de ménage, opérateur d’ascenseur, nounou) et sont licenciés injustement au premier larcin survenu de le bâtiment.

A propos du film The Apartment de Billy Wilder :

– Joan : I’ve heard that Shirley McLain is good…
– Sterling : Oh please. A white elevator operator, and a girl at that ?

Sterling affichera également son antisémitisme dans plusieurs épisodes. Le scénario n’en est pas pour autant moraliste et l’auteur ne prétend pas présenter un documentaire historique.

Parmi les thèmes récurrents, voire même omniprésents de la série, on notera la cigarette et l’alcool. Cela témoigne d’une époque bien différente de nos années 2000.

La cigarette… Personnages masculins et féminins fument dans chaque plan : pendant les réunions, au cours du repas, avec les enfants, dans la chambre à coucher… Seul Bertram Cooper (Robert Morse) demandera de ne pas fumer dans son bureau (décoré à la japonaise, il est obligatoire de se déchausser pour y rentrer).

Le premier épisode traite d’ailleurs en partie de la communication des cigarettiers devant faire face pour la première fois à des études médicales présentant les dangers potentiels pour les fumeurs.

– Barman : I love smoking. My wife hates it. Reader’s Diget says it will kill you.
– Donald : Yeah, I heard about that.
– Barman : haha, Ladies love their magazines…

Le traitement de la cigarette n’est pas sans rappeler celui de Jason Reitman dans son film Thank You for Smoking (2005).

L’alcool… Fort (Whisky, Gin, Vodka). Partout et à toutes occasions, mais principalement au bureau. On pense à JR Ewing dans Dallas. Les Mad Men boivent beaucoup et parfois trop. Leurs femmes malheureusement parfois également.

Mad Men a remporté deux Golden globes en 2007 : celui de la meilleure série dramatique et celui du meilleur acteur de série pour Jon Hamm.

On notera un générique original, particulièrement réussi graphiquement (c’est la moindre des choses pour une agence de pub) sur une version instrumentale de Beautiful Mine (RJD2). Déroutant au début, il prend tout son sens au cours de l’histoire et cadre bien avec la personnalité de Don Draper.

Sterling à sa maitresse : Do you know how unhappy I was before I met you? I was thinking of leaving my wife.

Racisme, misogynie, trahison, adultère, ambition, émancipation. Mad Men est une brillante série peignant un portrait acerbe d’une amérique des années 60 portée par une forte croissance.

Mon avis nécessairement partial : c’est un des meilleurs shows diffusés depuis plusieurs années. On n’attend plus qu’une chose : la deuxième saison.

Fiche technique

Scénario : Matthew Weiner

Genre :drame

Durée : environ 45 min

Première diffusion : 19 juillet 2007

Acteurs :

– Jon Hamm – Don Draper
– Elisabeth Moss – Peggy Olson
– Vincent Kartheiser – Pete Campbell
– January Jones – Betty Draper
– Christina Hendricks – Joan Holloway
– John Slattery – Roger Sterling
– Rosemarie DeWitt – Midge Daniels
– Talia Balsam – Mona Sterling
– Robert Morse – Bertram Cooper
– Michael Gladis – Paul Kinsey
– Aaron Staton – Ken Cosgrove
– Rich Sommer – Harry Crane
– Maggie Siff – Rachel Menken
– Bryan Batt – Salvatore Romano