1890, Irlande.
Tandis que tout le monde célèbre la nuit des feux de la Saint Jean, Mademoiselle Julie et John, le valet de son père, se charment, se jaugent et se manipulent sous les yeux de Kathleen, la cuisinière du baron, jeune fiancée de John. Ce dernier convoite depuis de nombreuses années la comtesse voyant en elle un moyen de monter dans l’échelle sociale.
Avis de Claire
Mademoiselle Julie (1888), oeuvre théâtrale
Transposée en Irlande, l’intrigue est un huis clos étouffant où lors d’une nuit de la Saint-Jean, une jeune aristocrate belle et arrogante, mais aussi perdue, voit son destin basculer inexorablement vers le tragique, la folie et le chaos qui symbolise la fin de son monde. Le parallèle avec l’Ophélie de Shakespeare [[Liv Ullmann s’est inspirée pour la scène finale du tableau préraphaélite Ophelia de Millais.]] est souligné par la réalisatrice Liv Ullmann, dans une brillante mise en scène où Jessica Chastain décline toutes les facettes de son talent.
Face à elle, une Samantha Morton bluffante de pudeur et de retenue, et un Colin Farrell quelque peu engoncé dans un rôle difficile, où il n’évite malheureusement pas un peu de cabotinage. L’affrontement entre son personnage et celui de Jessica Chastain, rouage de l’action, est un sommet de domination psychologique et de manipulation, où chacun prend tour à tour le pouvoir sur l’autre.
Les dialogues sont sublimes, sans temps mort, une véritable « tragédie naturaliste » pour reprendre les mots de son auteur. Si vous le pouvez, ne manquez pas la V.O. qui marque encore plus le clivage entre les classes, où Julie s’exprime avec un délicat accent anglais, tandis que le valet de son père parle avec l’accent cru irlandais, luttant même contre ce fait, dévoilant par là même sa volonté de sortir de sa condition.
Le film respecte les règles d’unité théâtrale, temps, lieu et action, avec seulement les trois personnages. Choix délicat, qui rapproche le long-métrage du théâtre filmé. Mais les décors magnifiques, et surtout la performance de Jessica Chastain, font de cette version de l’oeuvre de
Avis de Valérie
C’est une histoire de classes, de différences, de personnes opposées en tout qui se cherchent sans pouvoir jamais se trouver… C’est en tout cas la condamnation de la société lorsque que la fille d’un comte se mèle d’une manière indécente à ses gens.
Mademoiselle Julie ne pense pas vraiment à mal, mais une chose est certaine elle ne pense pas au mal qu’elle fait à sa réputation, à l’équilibre qui existe entre la gentry et le gens du village, ni à ses propres employés.
John, le valet de son père, est beau et stylé. Il est également dévoré par l’ambition à moins que ce soit la peur de l’extrême pauvreté qui le ronge et qui pervertit ses émotions. On note l’excellente prestation de Colin Farrell qui donne vie à ce personnage frustre, pouvant être violent mais également sensuel et touchant.
Le troisième personnage est la fiancée de John (interprétée par l’étonnante Samantha Morton). Une femme simple, qui connaît sa place et dont la foi profonde guide la vie non pas comme une béquille mais comme une dynamique qui lui fait accepter sa condition et apprécier ce que la vie lui offre.
La magnificence des images n’a d’égale que la beauté, la grâce, et le talent de Jessica Chastain. A aucun moment sa prestation n’est émaillée de discordances, c’est une sublime partition sans fausses notes. Sa délicatesse et sa silhouette diaphane est mise en ombre et lumière par la pellicule.
La réalisatrice, Liv Ullman, a été dans une autre vie une actrice renommée, la muse de Ingmar Bergman et d’un cinéma suédois qui a privilégié l’introspection et la psychologie. Bien qu’influencée par son mentor, elle sait et arrive à relater une histoire simple et lisible par tous. Elle ne peut s’empêcher toutefois d’y glisser différents niveaux de réflexion passionnants mais qui ne prennent jamais le pas sur la trame d’une austère beauté. C’est exemplaire !
Cette histoire dramatique avance jusqu’à sa conclusion – logique – qui
Fiche Technique
Sortie : 10 septembre 2014
Durée : 133 minutes
Avec Jessica Chastain, Colin Farrell et Samantha Morton
Genre : drame
d’après la pièce de August Stindberg