Primaire – Avis +

Présentation officielle

Florence est une professeure des écoles dévouée à ses élèves. Quand elle rencontre le petit Sacha, un enfant en difficulté, elle va tout faire pour le sauver, quitte à délaisser sa vie de mère, de femme et même remettre en cause sa vocation. Florence va réaliser peu à peu qu’il n’y a pas d’âge pour apprendre…

Avis de Vivi

Depuis son premier film, nous savons qu’Hélène Angel aime ausculter le coeur qui bat sous la peau des hommes (Peau d’homme, coeur de bête, 1999).

Pas surprenant, donc, de l’entendre affirmer que son dernier opus, Primaire, est né du désir de capter l’émotion en jeu lors du passage de l’école primaire au collège, autrement dit lorsqu’il faut muer et quitter l’enfance. Elle dit aussi avoir voulu faire un film plus solaire-il est vrai que le jaune est une couleur « primaire »…- Ainsi, ce dernier opus ne se présente pas comme un film de plus sur l’école mais comme un conte.

Donc, il était une fois une professeure des écoles, »institutrice » n’étant plus au goût du jour, Florence (Sara Forestier), passionnée par un métier accaparant qui menace l’équilibre de sa vie personnelle… Elle est mère d’un fils, Denis, qu’elle élève seule, qui rêve de partir à Java avec son père et qui étudie aussi dans sa classe de CM2.

Pour ajouter à la confusion, elle loge dans son établissement (le loyer est plus raisonnable) et seul un couloir délimite une frontière fragile entre sa vie professionnelle et sa vie privée. Sacha, un élève perturbé ,abandonné par sa mère, profite de cette porosité en passant, presque par effraction, de la classe de Florence à son espace privé, voire intime (il extirpe un soutien-gorge d’un panier à linge dans sa salle de bain et emporte un foulard après l’avoir humé…primaire…).

Effet boule de neige, c’est par Sacha que Mathieu (Vincent Elbaz), l’ex de sa mère défaillante, fait irruption dans l’école, dans la cuisine-les beaux mollets, les quadriceps sous la peau de la bête…primaire…- et dans la vie de Florence. La jeune femme, comme ses élèves, doit apprendre à faire la distinction entre être et avoir, régler des problèmes d’accord, et tenter de maîtriser la langue des émotions primaires pour devenir l’héroïne de sa propre vie.

La fougue de Sara Forestier nous emporte et nous fait vibrer à tout moment, le film doit beaucoup à la force de son interprétation et à la justesse du monde dépeint par Hélène Angel. Pas sûr que le spectateur retiendra les quelques acronymes que la réalisatrice a pris un malin plaisir à mettre dans la bouche de Florence censée informer sa stagiaire, Laure, de l’existence des PPRE, des EPSE en passant par les ULIS ou les AVS (comme Mme Duru, l’assistante à la vie scolaire d’une autiste émouvante) qui, de toute façon, risquent de dater le film, n’oublions pas qu’un sigle chasse très vite l’autre.

Pas évident non plus que la qualité de l’anglais parlé en primaire le rassurera ni qu’il aura mesuré la charge de travail que représente la préparation des cours d’un(e) enseignant(e), aucune allusion à ce sujet, preuve que c’est bien le poids des affects plutôt que celui des cartables qui intéresse la cinéaste. La caméra souvent fixe se tient à hauteur d’enfant, centre du système éducatif et aussi un coeur qui palpite et fait palpiter celui des adultes qui ne sont jamais que de grands enfants (« un élève qui pue, il faut lui passer un savon! » fait écho à « Tu pues! » lancé par les élèves à Sacha plus tôt dans le film…).

Tourné en premier pour désinhiber les enfants acteurs et installer une relation de confiance, le spectacle de fin d’année met en lumière des enfants transcendés par leurs personnages et révèle sa vérité à Florence jusque là assaillie par le doute. Une façon subtile de montrer la beauté de l’acte de transmission, la connivence qui existe entre une maîtresse et ses élèves, entre une cinéaste et ses spectateurs, lesquels peuvent sortir de la salle conquis par la performance livrée par tous les enfants du film, indubitablement nés pour être vivants (born to be alive), dirigés d’une main de maîtresse et en pensant, comme Florence, que « l’école républicaine, c’est ce qu’il y a de moins pire »…

Fiche technique

Sortie : 4 janvier 2017
Durée : 105 minutes
Avec : Sara Forestier, Vincent Elbaz, Patrick d’Assumçao
Genre : comédie dramatique