Rencontre avec Jérôme Noirez et les éditions Gulfstream

On commence ainsi avec la publication de Brainless, un roman qui va faire grimacer certains, sourire d’autres. on fait en effet la rencontre d’un adolescent étonnant au portrait atypique qui n’aurait pas dû continuer à vivre. Il forme un certain paradoxe car on relève chez lui des stéréotypes presque caricaturaux que l’on peut retrouver dans la société actuelle. C’est un roman où la violence n’est pas là où on l’attend. c’est un portrait d’une jeunesse décadente avec une certaine sensibilité.

Brainless est donc un projet né à partir d’un échange téléphonique fondé sur cette envie de développer une nouvelle collection avec une forte tension narrative. Envie de sortir des sentiers battus et du catalogue traditionnel de Gulfstream tout en gardant une qualité d’écriture, de profondeur en se penchant sur une autre facette de la société.

Ce roman c’est donc l’histoire de Jason, un adolescent devenu zombie de manière absurde suite à une ingestion massive de maïs. Un roman de zombies n’était pas forcément ce qui vient tout de suite en tête pour débuter une nouvelle collection, mais au final la cassure se fait de manière plus forte.

Il y avait derrière Brainless l’idée d’une série mais pour l’instant cela reste un volume unique. Il a fallu à peu près un an à Jérôme Noirez pour l’écrire et son manuscrit s’est fait ‘dévorer’ par l’équipe éditoriale.

Jérôme Noirez : On avait parlé de collection young adult, qui est un terme qui me laisse perplexe. J’avais une vision des séries teens américaines trashs et sexuelles mais qui me font rire à cause de leur dimension désespérante. Ma second inspiration est les BD de Charles Burns. Mes idées sont imagées avec cet auteur, il crée un monde de college un peu intemporel, étonnamment sordide.

Puis suite à cette présentation générale de l’oeuvre ainsi que de cette nouvelle collection, il y eu une session de questions-réponses avec Jérôme Noirez. Attention, les questions et réponses peuvent contenir des spoiles, alors si vous n’avez pas lu le livre, il est conseillé de ne pas lire la suite.

Question : La bande dessinée a un côté très visuel, est-ce que cela vous a beaucoup marqué, le roman est très caricatural, mais n’est-ce pas des archétypes qui forment une certaine réalité ?

Jérôme Noirez : J’ai des souvenirs de correspondants américains, et ce qui m’a marqué c’est que ces adolescents sont tous des acteurs nés. On dirait qu’il sortent tout droit d’un teen movie, cette image est donc une certaine réalité.

Ensuite j’aime les caricature, déformer, mes goûts ne se portent pas trop sur le réalisme, par exemple, Charles Burns fait du noir et blanc mais c’est très intense. Donc entre le grotesque et le réalisme, il n’y a qu’un pas.

Question : Comment s’est passée la genèse du projet ?

Jérôme Noirez : J’ai déjà publié 120 journées qui parle d’ados enlevés dans des univers absurdes et je suis revenu avec une idée de labyrinthe scolaire. Le poids de l’architecture, des escaliers, salles de classe, d’un lieu sans de grands repères avec des couleurs ternes.

Question : Un gentil zombie, cela ne fait-il pas penser à Warms Bodies ?

Jérôme Noirez : Je ne l’ai pas lu, mais je crois que c’est plus fleur bleue que Brainless.

Question : Il y a une dimension pathétique et humoristique, notamment avec Bryan.

Jérôme Noirez : Le drolatique et le pathétique font bon ménage, au vu de l’existence et si on l’accepte.

Question : êtes-vous plutôt zombie rapide ou lent ?

Jérôme Noirez : Le héros n’est pas tant un zombie qu’un type mort qui revit. Mais sinon, je suis plus zombie lent, pour moi c’est une masse, mais je ne suis pas allé sur ce terrain car beaucoup de choses ont déjà été faites à ce sujet.

Question : Pourquoi avoir choisi le zombie ?

Jérôme Noirez : J’adore le zombie ! Autant le vampire m’emmerde, le zombie fait partie de moi. C’est le monstre d’épouvante qui me terrifie le plus. Et il me terrifie et j’aime ça, le truc c’est qu’il ne parle pas. Il est très à la mode en ce moment mais je l’ai toujours aimé.

Question : Vos ouvrages sont donc plus fantasy d’habitude ?

Jérôme Noirez : J’ai un côté un peu schizophrène. Je suis incapable de rester sur un genre fixe car je m’ennuie. Ce n’est pas non plus le même type d’écriture, ainsi, je suis plus proche du genre de Brainless.

Question : Connaissiez-vous tous les mots du livre ou avez-vous dû les chercher (notamment concernant le corps humain) ?

Jérôme Noirez : Je n’ai pas trop cherché, mais j’ai des documents standards sur l’anatomie. J’avais même une planche anatomique accrochée au mur mais j’ai essuyé des réflexions alors je l’ai enlevée (rires) !

Question : Le texte final correspond-il à l’idée que tu te faisais du roman ?

Jérôme Noirez : J’avais un synopsis, le début et la fin, mais oui, globalement j’ai suivi ce que je voulais, même s’il y a fallu par la suite gérer le bon dosage entre les éléments.

Question : Pourquoi un zombie gentil ?

Jérôme Noirez : Il ne l’est pas spécialement. C’est un bon gamin, il est gentil mais il est plus banal. Le héros est gentil de base. Le zombie d’origine est sans esprit, d’où son côté horrifique, on ne peut pas discuter avec un zombie. Notre héros oscille entre les deux états, on peut aussi voir ça comme une métaphore de la puberté mais je ne partage pas cette idée.

Question : Au final, la fin amène une sorte de rédemption, non ?

Jérôme Noirez : Je m’en fous en fait. J’écris en visuel, je me passe le film, les rushs dans la tête. Je n’étais pas bien dans l’écriture du chapitre de fin. C’est la première fois que j’imagine pour un roman de la violence gratuite comme dans un film américain à la con.

Question : Y’a-t-il eu une censure de l’éditeur ou une auto-censure de votre part ?

Jérôme Noirez : Il n’y a pas de censure. L’éditeur peut dire que c’est too much ou que c’est maladroit, il y a parfois des remarques sur la réflexion faite, mais pas de censure.

Question : Cela n’a pas été dur pour la scène de nécrophilie ?

Jérôme Noirez : Nécrophilie ? Je ne vois pas trop ! Sauf si vous pensez à cette certaine scène. J’en suis très fier. On fait face à une question pratique de l’existence du zombie. Est-il capable d’avoir une érection ? La réponse est oui. Alors oui il y a un frisson du rapport sexuel avec une chose qui est morte. C’est la même chose lorsqu’ils s’embrassent, ses lèvres sont froides et ça ne doit pas sentir très bon.

Question : Les prénoms Cathy et Cassidy se ressemblent, est-ce voulu ?

Jérôme Noirez : Non, c’est un hasard. Je ne sais plus pourquoi j’ai choisir Cathy. Mais pour Cassidy, dans mon imagination c’est la salope intégrale, une fille totalement immonde qui méprise ceux qui ne lui ressemblent pas et qui ne pense qu’à se faire des mecs. Bien sûr je suis persuadée que toutes les Cassidy ne sont pas comme ça, mais c’est ce que ce prénom m’évoque.

Question : Quel est votre prochain projet ?

Jérôme Noirez : Je dépoussière plusieurs vieux manuscrits que je n’ai encore proposés à aucun éditeur. Au début je me disais « Quelle merde tu as écrit » mais surprise, il y a des choses pas mal !

Puis enfin, suite à cette séance de questions-réponses, nous avons pu écouter l’auteur faire un test pour mettre le moment de la mort de Jason en musique !

Crédit photo : VR pour Onirik.net

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Posted by Onirik on jeudi 21 mai 2015