Rodin et la photographie – Avis +

L’exposition qui se tient au musée Rodin à partir du 14 novembre 2007 pour s’achever le 2 mars 2008 retrace de manière intelligente et artistique l’évolution de la carrière d’Auguste Rodin à travers les différents photographes que Rodin a successivement invités dans ses ateliers à Paris et à Meudon.

En effet, la photographie a occupé une place importante dans la vie et l’œuvre de Rodin puisque l’artiste a noué des amitiés plus ou moins éphémères avec ses collaborateurs. Les photos prises lui permettaient d’observer l’évolution de son travail mais également de réfléchir à de nouvelles idées en retouchant directement les reproductions au crayon ou à l’encre. Quelques photos mettent alors en relief certaines perspectives qu’a eu Rodin sur telle ou telle œuvre, sans que cela ait entraîné toutefois de correction sur les sculptures elles-mêmes. Ces reproductions servaient également de catalogue pour vendre les œuvres lors des expositions.

Si le travail était gratifiant pour la plupart des photographes, les relations avec Rodin ne furent pas toujours paisibles, comme en témoignent certaines déclarations de collaborateurs qui ne supportaient pas que Rodin dicte leur façon de travailler et dirige leur réalisation entièrement et dans le moindre détail, allant jusqu’à ordonner au photographe de détruire les clichés qui ne lui convenaient pas.

Au-delà de cette découverte passionnante sur un art méconnu au service de Rodin, l’exposition des œuvres en fonction des photographes permet de comparer les différentes techniques de reproduction et les différents choix de sujets. Alors que Jean Limet, qui réalisait la patine des bronzes de Rodin, a gardé cette teinte sombre pour ses clichés, entraînant une ambiance intimiste et mystérieuse, Jacques-Ernest Bulloz a effectué un travail nettement plus lumineux et coloré grâce à des tirages au charbon dont la qualité et la stabilité dans le temps ont gagné en réputation au fil du temps. Ces photographes français sont souvent des connaissances de Rodin qui leur a donné la chance de travailler avec lui, ou plutôt pour lui.

Des artistes étrangers se sont aussi intéressés à son œuvre et ont voulu collaborer avec lui. Ainsi, deux jeunes anglais, Stephen Haweis et Henry Coles, ont réalisé plusieurs clichés de ses œuvres, Gertrude Käsebier, une portraitiste américaine a préféré se concentrer sur le personnage de Rodin lui-même avec une série de photos de l’artiste tous plus intimes et révélateurs de l’artiste. Alvin Langdon Coburn, issu de l’école pictorialiste américaine, a assisté à l’inauguration du Penseur devant le Panthéon et, à son retour, a accepté de prendre la même pose que la sculpture, réalisant un cliché original et humoristique.

Ainsi, la photographie autour de Rodin est devenue une œuvre en elle-même comme en témoignent les magnifiques reproductions que le musée Rodin a exposé et mis en valeur grâce à de subtils éclairages tout en nuances, face inconnue et ignorée du grand public mais qui mérite d’être découverte que l’on soit connaisseur éclairé et spécialiste de l’œuvre de Rodin ou simple curieux et amoureux de l’art en général.