Spirit Lake – Avis +

Présentation de l’éditeur

Québec, 13 mai 1915, Dans l’infirmerie ou camp de détention de Spirit Lake. Peter Gaganoyitch agonise sur un lit de camp. Il n’a que quatorze ans. Comment en est-il arrivé là ? Trois mois plus tôt, il débarquait au Canada, avec Iwan, son frère, et sa grand-mère adorée fuyant la guerre et l’Autriche-Hongrie. Ils pensaient atteindre un nouveau paradis… Comment un jeune garçon, interné au milieu d’un no man’s land de glace, utilise miraculeusement ses qualités humaines, son imagination. Et comprend que le bonheur se choisit chaque matin, au saut du lit, comme un vêtement. Un magnifique roman, une magistrale leçon de vie.

Avis de Trinity

Qui connaissait l’existence de camps de détention au Québec pour les immigrés austro-hongrois lors de la Première Guerre Mondiale ? En tout cas, pas moi, qui tiens encore une fois une excellente d’occasion de m’instruire tout en passant un bon moment de lecture. Attention, ce n’est pas du tout un roman ennuyeux qui passe la majorité de ses pages à des descriptions aussi longues que sans intérêt. Il s’agit d’un vrai récit avec une intrigue cohérente et des personnages forts et attachants, chacun à leur manière. Mais l’aspect pédagogique prouve de manière définitive qu’on en apprend tous les jours grâce aux livres ! Ainsi, les Canadiens, alliés de l’empire britannique, considéraient tous les ressortissants de l’empire austro-hongrois comme des ennemis de la Couronne britannique, et devaient par conséquent être arrêtés et enfermés. Au-delà de l’intérêt historique, il s’agit avant tout d’une histoire poignante de deux frères qui doivent survivre dans un camp loin de leur famille et loin de leur pays.

Peter est Ukrainien et a fui avec sa grand-mère Irène Zabalète et son frère ainé Iwan quelques jours après l’assassinat de l’archiduc François-Ferdinand, évènement déclencheur de la Première guerre mondiale. Tous trois se mettent en route clandestinement vers le Canada. Mais dès leur arrivée, le cauchemar a débuté avec l’arrestation des deux jeunes garçons, Peter étant pris pour un homme de 19 ans alors qu’il n’en a que 14. De plus, une révélation va lui être faite, brutale, et qui va remettre son identité en question. Commence alors dans la « ferme expérimentale » de Spirit Lake, qui est en fait un véritable camp de détention pour hommes célibataires, une existence faite de coups et de brimades de la part des soldats gardiens, de repas frugaux, d’air glacial et de lits miteux. Cela ne change pas vraiment du confort précaire auquel Peter était habitué depuis son périple d’Ukraine mais les conditions de vie sont rudes et Peter sera bientôt séparé d’Iwan.

Le récit se partage entre l’alitement de Peter dans le camp de Spirit Lake en mai 1915, et un flash-back 3 mois plus tôt, lors de leur arrivée au Canada en février, rendant le propos plus dramatique et la tension plus palpable que si le récit était tout à fait linéaire, puisque le lecteur a déjà un aperçu de la tragédie qui va se jouer. Au fur et à mesure que les jours, puis les semaines et les mois s’égrènent, on s’approche du moment fatidique qu’est le présent et on se surprend à retenir son souffle dans l’attente du basculement de la vie difficile mais routinière que Peter s’est forgée. En effet, même avec des conditions peu favorables peut se dégager un semblant d’existence faite d’habitudes, de maigres satisfactions, et même de brefs moments de bonne humeur.

L’épilogue, surprenant et triste, met en lumière le peu de souvenirs qu’ont les Québécois sur leur histoire, les camps de détention ayant été rayés du territoire et de l’Histoire. Un grand merci alors à Sylvie Brien, l’auteur de cette histoire touchante, de faire un rappel bien utile à la mémoire de chacun, enfant, adolescents ou jeunes adultes.

Fiche technique

Format : poche
Pages : 237
Editeur : Gallimard Jeunesse
Collection : Scripto
Âge : à partir de 13 ans
Sortie : 13 mars 2008
Prix : 9,50€