Un amour de déraison – Avis +/-

Résumé

Anne-Thé était l’épouse, celle qui connaissait son mari par cœur, ses envies, ses petites manies, et supportait ses écarts depuis des années sans se plaindre. Elle était la mère, d’Enguerrand et d’Aliénor, auxquels elle a transmis l’amour de la terre et la liberté d’esprit. Sans oublier la grand-mère, celle qui partait dans des délires d’enfant et échangeait des textos. Mais ce soir, sous le tilleul, bercée par la mélodie de Schubert, Anne-Thé est femme. Pour Florian, elle est l’Étoile, tout ce qu’il y a de déraisonnable.

Au cœur du Haut-Médoc, dans le domaine d’Aiguillon, entre véraison et vendange, elle tente de concilier sa vie au sein d’une famille envahissante et cette passion inattendue qui lui ouvre les bras…

Avis de Marnie

Tout est dans le titre… c’est justement là que se situe le paradoxe du roman et le manque d’intérêt que l’on peut alors éprouver à avoir ou non envie de poursuivre la lecture. Ce qui fait pencher la balance ? L’écriture toujours pleine de vie de Janine Boissard, qui sait insuffler de l’émotion et du souffle à son roman, avec ses petites phrases courtes qui oscillent entre tendresse, chaleur, tristesse, regrets et espoir !

Janine Boissard nous offre une année charnière de la vie d’une femme, épouse d’un notable près de Bordeaux, propriétaire d’un grand et beau domaine où les vignes sont reines. Anne-Thé vient d’avoir soixante ans et fait soudain le bilan de son existence. Mariée depuis quarante ans avec un époux volage, sauvant les apparences aux yeux de ses relations, amis et surtout de sa famille, mère et grand-mère dévouée… et voici que, presque tranquillement surgit le grand amour. Il a le visage d’un jeune musicien exalté de trente ans. Tout cela arrive seulement trop tard ! C’est cette passion qui ne peut se vivre que dans le moment, qui ne peut survivre à la réalité qui fait renaître à la vie Anne-Thé, épouse résignée, mère compréhensive, grand-mère complice qui a oublié qu’elle était une femme. Au plus profond d’elle, notre héroïne ressent alors cette poussée de fièvre, et nous décrit alors avec une étrange similitude la véraison, élément indissociable de la vie des habitants du Haut-Médoc…

L’arrière-plan, cette chaude et riche région de la Gironde, est décrite par Anne-Thé avec plus d’émotion que de couleurs. Janine Boissard préfère toujours le tactile, les senteurs, les traditions… comme elle décrit les familles, les êtres humains. Le coeur, les sentiments sont ce qui la fait vibrer et elle sait depuis longtemps nous transmettre sa vision du ressenti plutôt que de jouer sur un vocabulaire riche d’images ou d’envolées lyriques. Il existe un agréable aspect terre à terre, âpre mais aussi généreux à nous raconter ainsi cette histoire où la tristesse de ce qui aurait pu être mais ne sera jamais nous submerge bientôt.

Le seul vrai point négatif est l’erreur de casting du mari. Franchement, ce pauvre Paul est grotesque, d’un ridicule achevé. En plus, pour en rajouter, le voici gaffeur et presque sourd. Nous avons du mal à croire l’héroïne qui ne cesse de faire remarquer « qu’elle l’aime bien » mais dont le mépris ressort dès qu’elle l’évoque… Rester quarante ans auprès de cet homme qui n’inspire ni respect ni même un brin de sympathie, que ce soit chez son épouse, ses enfants ou même ses petits-enfants, nous avons seulement envie de demander à Anne-Thé si la consolidation de sa famille et de son domaine valait un tel sacrifice.

Cette chronique d’un amour-mort annoncé nous fait également penser au Chéri de Colette (évoquée dans le roman) à ces histoires où les amants se croisent trop tôt ou trop tard…

Une atmosphère nostalgique, tendre-amère…

Fiche Technique

Format : poche
Pages : 229
Editeur : Pocket
Sortie : 2 avril 2009
Prix : 5,90 €