Un enfant de sang chrétien : Affaire Beilis – Avis +

Présentation officielle

Un jour de mars 1911, le cadavre d’un garçon est retrouvé dans une grotte d’un quartier déshérité de Kiev. L’enfant est à demi nu, son corps est lardé de 47 coups de couteau.

L’Ukraine étant alors intégrée à la Russie tsariste, sa population juive est soumise aux mêmes règles de ségrégation et les pogroms sont légion. Le meurtre du garçon va réveiller une vieille superstition antisémite, celle des sacrifices rituels d’enfants chrétiens.

Reste à désigner un coupable, ce sera Mendel Beilis. Ce père de cinq enfants, ouvrier à la briqueterie voisine, mène une vie paisible et discrète. Mais il est juif.

Un simulacre de procès commence. Mais, contre toute attente, l’affaire Beilis va connaître un retentissement extraordinaire, mobilisant bientôt tout ce que le monde compte de Lumières, de Thomas Mann à H.G. Wells, en passant par l’archevêque de Canterbury, sir Arthur Conan Doyle ou Anatole France.

Et pendant que l’affaire Beilis enflamme l’Europe, dans l’ombre, Vera Tcheberyak, redoutable chef de gang, jubile, ravie de voir l’attention de l’opinion se détourner de ses propres activités sanguinaires…

Un document exceptionnel qui nous éclaire encore une fois sur les barrières que l’ignorance et le fanatisme dressent entre les hommes.

Avis de Cheshire

Mars 1911, Kiev, Ukraine. Piotr Elandski est avec son ami Boris Belochtchiski lorsqu’il découvre ce qu’il pense d’abord être une poupée abandonnée dans une grotte. Prévenue, la police découvre, comble de l’horreur, un jeune garçon mort. Son petit corps est lardé de coups de couteau. Mais qui donc a pu commettre un crime aussi atroce ?

C’est le début d’une longue enquête et d’un tout aussi long procès qui marquera la Russie tsariste d’une empreinte aussi indélébile que l’affaire Dreyfus en France. Le lecteur découvrira avec Un enfant de sang chrétien : L’affaire Beilis – meurtre et conspiration dans la Russie des tsars un document sur l’une des dernières grandes affaires ayant marqué la dynastie des Romanov.

L’auteur s’est livré à un véritable travail de fourmi pour reconstituer l’affaire à partir de la retranscription du procès, des journaux de l’époque, de documents émanant des Archives nationales de la région de Kiev, d’un recueil de dépositions et de quelques autres ouvrages dont l’autobiographie du principal « personnage » de l’histoire : Menahem Mendel Beilis.

C’est un essai particulièrement dense qui n’est pas lisible en une fois, ne serait-ce que par la complexité des faits qui y sont racontés. En effet, c’est le procès de toute une époque qui est conté au lecteur, agrémenté de photos (de la victime, des suspects, des lieux…).

Les apparences sont trompeuses et alors que la médecine légale n’en est qu’à ses prémices, les témoignages sont particulièrement importants. Or, en 1911, la grande Russie est gangrenée par des antisémites et ultra-nationaux qui n’attendent qu’un prétexte pour s’en prendre à ceux qu’ils estiment coupables…

Alors certes l’ouvrage est lent et complexe et peut décourager. Mais il offre une vue assez complète sur une partie de l’histoire russe qui marqua le pays pendant très longtemps[[le parti nazi y consacra un dossier en 1926, l’affaire resta dans les mémoires polonaises (Les polonais appelaient « savon Beilis » un produit lavant dont la rumeur disait qu’ils étaient fabriqués à Auschwitz avec la graisse des exterminés. Âmes sensibles…)]], associée à l’antisémitisme persistant et latent.

Plus que les faits en eux-mêmes, ce qui est réellement intéressant dans le livre, c’est la description de tout le contexte géopolitique de l’époque avec son lot d’hommes puissants corrompus, de manipulateurs d’opinions. Le texte particulièrement documenté se lit comme un roman alors qu’il s’agit d’un fait divers réel.

Fiche technique

Format : broché
Pages : 448
Éditeur : Belfond
Sortie : 15 septembre 2016
Prix : 21,50 €